Ce n’est pas parce que le diagnostiqueur commet une erreur, qu’il passe à côté de matériaux amiantés, par exemple, que le vendeur est automatiquement hors de cause. Et lorsque ce vendeur est en plus un professionnel de la construction, inutile d’espérer se réfugier derrière le rapport. Illustration à travers un récent cas de jurisprudence. Le vendeur a souvent le sentiment d’être à l’abri : « Ce n’est pas moi, c’est le diagnostiqueur ! » Sauf que la jurisprudence est claire : le vendeur n’est pas intouchable. Il peut être condamné s’il est de mauvaise foi ou s’il ne peut raisonnablement être considéré comme un simple profane. Dans cette histoire, le diagnostic amiante produit lors de la vente en 2017 avait bien identifié la présence d’amiante dans des dalles de sol d’un placard de bureau, mais pas dans la toiture du bâtiment à usage de bureaux et d’entrepôt. Pour l’acquéreur, une évidence : correctement informé, il n’aurait jamais acheté au même prix. Il se retourne donc contre le diagnostiqueur… mais aussi le vendeur. Celui-ci détenait le bien depuis 1994, avait fait réaliser des travaux en 2016 et ne pouvait, selon l’acquéreur, ignorer que la toiture en fibrociment était amiantée. LOCAUX NON VISITÉS, NON PRÉCISÉS DANS LE RAPPORT De son côté, le diagnostiqueur estime n’avoir commis aucune faute : les plaques amiantées n’étaient pas visibles. Ni de l’intérieur puisqu’elles étaient dissimulées par des faux-plafonds, isolants et plaques de plâtre; ni de l’extérieur, puisque elles étaient masquées par un bandeau métallique et les pignons. Malheureusement, le diagnostiqueur n’a pas précisé dans son rapport « les locaux et ouvrages non visités ». La cour d’appel rappelle que « les locaux non visités doivent être identifiés avec la mention du motif de la non-visite ». Dit autrement, l’amiante du toit n’était peut-être pas accessible, mais le diagnostiqueur n’a pas pris soin de le préciser et de l’expliquer dans ses réserves. Simple négligence dans la rédaction, mais la justice estime que « avec une meilleure et exacte information, l’acquéreur aurait été en mesure de négocier son prix d’achat». Que le diagnostiqueur ait commis une erreur, ne signifie pas que le vendeur est exempt de tout reproche. Identifié par son activité comme professionnel de la construction, il ne peut invoquer la clause d’exclusion de la garantie des vices cachés. « L’acte de vente contient une clause d’exclusion de la garantie des vices cachés, laquelle n’a cependant pas vocation à bénéficier au vendeur, notamment s’il est de mauvaise foi pour connaître le vice au moment de la vente, situation à laquelle est assimilée celle d’un vendeur professionnel, censé connaître les vices de la construction.» Sa responsabilité est également retenue. L’acquéreur réclamait le désamiantage complet pour un montant d’environ 62.000 euros. La cour estime que l’état de la toiture ne justifie pas un retrait de l’amiante : une simple surveillance évaluation périodique, tous les trois ans maximum suffit. Résultat : le vendeur et le diagnostiqueur échappent à la réparation intégrale du préjudice, mais ils sont condamnés à verser 35.000 euros au titre de la perte de chance de négocier un meilleur prix. Cour d’appel d’Aix-en-Provence, 25 novembre 2025, RG n° 21/10257.